Une soirée hors de l'ordinaire [pv]

Il sortait à peine du boulot, vêtu de son grand manteau et de son chapeau de style plutôt ouvrier, que, tournant un coin de rue, il tombe sur Estefania. Cela ne pouvait pas être une coïncidence et il le savait. N'empêche, il était content de la revoir et de savoir comment elle allait. Elle continue de faire les frais de la plupart des jeunes nobles de la ville, qui pour bon nombre d'entre eux, rêve de la courtiser avec succès, pour la marier, elle qui est un si bon parti et qui est à un âge où déjà, il est considéré comme étant tard pour se marier. Inutile donc de dire que la pression familiale est forte. Prenant de ses nouvelles, tenant toujours à savoir s'il va bien, elle lui explique qu'elle a un rendez-vous avec un jeune homme au théâtre de Prague, mais il lui faut un cocher, digne de confiance qui plus est, sinon, elle devra oublier cette soirée, ainsi que le beau garçon qui vient avec.

N'ayant rien de prévu pour cette soirée en particulier, sinon que de faire un tour chez sa famille pour prendre de leur nouvelle, il accepte donc, la belle Estefania lui étant alors très reconnaissante, de son côté, il en sourie, un peu bête. Disons qu'il s'est juré à lui-même, il y a un petit bout de temps qu'il sera toujours la pour veiller sur elle. Elle est un peu la petite sœur qu'il aurait aimé avoir et puis, tout un monde les séparant, il est fils de valet, elle est fille de noble, c'est la meilleure relation qu'ils puissent avoir. Peu importe ce qui arrive, elle sait que Thomas sera toujours là pour elle, fidèle au poste.

Il arriva devant la maison des Roumanov pile à l'heure, en bon cocher et Estefania, de son côté pris un peu de retard mais cela ne l'a dérangeait pas. Il la salut, fait le salut coutumier, puis lui ouvre la porte de la voiture, la laissant monter à bord. Grimpant au devant de la diligence, il les chevaux en marche et au bout d'un certains temps, ils arrivent au théâtre, à temps pour la représentation. Stationné sur le bord d'une rue, à proximité du théâtre, il lit un livre, se disant que lorsqu'Estefania sortira du théâtre, il ira la chercher pour qu'elle n'ait pas à faire un pas de plus dans la rue.

Thomas a lui l'autre jour un article sur Alexandre Romanov, tsar de Russie et le vainqueur de Napoléon (enfin, un des), que Thomas admirait secrètement, tout comme il admire les idéaux de liberté et de justice des révolutionnaires, mais par les temps qui court, ce n'est guère populaire et il vaut mieux se taire. En tout cas, il se demande si Roumanovna ne serait pas une simple déviation tchèque du nom de famille russe. Peut-être pas non plus.

Il était dans cette pensée lorsqu'il aperçoit la jeune femme qui descend les escaliers du théâtre, l'air frustré et il se dépêche de réveiller les chevaux en un claquement du fouet. Descendant de la voiture, il se demande bien ce qui se passe.

-Qu'est-ce qui se passe? La pièce était mauvaise à se point?

10 dénaires

& DAMN

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UNE SOIREE HORS DE L’ ORDINAIRE

Une soirée en compagnie d’un jeune et beau noble dont on est amoureuse est, pour toute personne normalement constituée, un bon moment en perspective. Puis, après cette bonne soirée passée en compagnie de l’être aimé, toute personne normalement constituée se fait ramener par cet homme. Quand on se met dans le cas d’Estéfania, la soirée en amoureux ne se passe jamais comme ça. Quand on est dans le cas d’Estéfania, la soirée en compagnie d’un jeune et beau noble dont on est amoureuse est un moment inoubliable, du moment qu’on reste dans la loge qu’on a réservé pour être seul. Car voilà, quand on est dans la situation qu’Estéfania vit en ce moment, on se rend compte que la vie n’est pas aussi rose qu’elle ne semble l’être. En effet, le jeune et beau noble qu’elle courtise s’appelle Nathanaël Sergueï. Il est intelligent, cultivé, poli, romantique,… Bref, tout ce qu’on pourrait espérer d’un homme. Quel est le problème, dans ce cas, me direz-vous ? Eh bien, Estéfania est promise à un homme. Cet homme s’appelle Khristyan Sergueï. C’est le même nom de famille, me direz-vous. Le problème vient de là. Estéfania est amoureuse du frère de l’homme auquel elle est promise. Et ce dernier détail, elle l’a appris durant cette soirée en compagnie d’un jeune et beau noble dont elle est amoureuse. Vous pouvez donc comprendre qu’Estéfania sortit du théâtre avec un air frustré. Mais commençons notre histoire là où tout doit commencer.

Quelques jours avant la représentation théâtrale, Estéfania avait été invitée par Nathanaël Sergueï. Ce dernier s’était décidé à inviter la jeune fille car il était au courant de la sortie de leur parents. Son frère, quand à lui, allait, comme d’habitude, boire dans un bar de Prague et finir la nuit dans son lit avec une conquête sans importance ou une prostituée. Estéfania, de son côté, avait besoin d’un cocher sûr en qui elle avait confiance. Elle pensa tout de suite à son ami, Thomas Lewis, qui avait travaillé pour sa famille pendant un moment. Elle avait un peu honte de fréquenter un jeune homme sans le consentement de ses parents, c’est pourquoi elle lui mentit légèrement en lui révélant ses plans de la soirée. Heureusement pour elle, celui qu’elle considérait comme son frère accepta.

Le jour de la représentation, elle attendit que ses parents soient partis avant de se préparer à sa sortie. Elle n’avait qu’une heure devant elle, alors il fallait faire vite. Elle laissa ses cheveux libres et mis une de ses robes préférées. Le vêtement était sans manches, de couleur beige, avec une bande en perles de tons brunâtres pour ne pas que sa robe tombe. Une autre bande en perles, de même ton que celle qui tenait la robe, parcourait son épaule d’avant en arrière de la robe. Ces préparations la mirent un peu en retard.

Une fois prête, elle descendit et sortit en douce de la maison. Là, elle retrouva Thomas qui la salua comme un cocher salue son passager. Estéfania se sentit mal à l’aise. En effet, elle n’aimait pas que ses amis, quelle que soit leur classe sociale, la salue comme si elle était supérieure à eux.

Elle monta dans la diligence et resta silencieuse pendant toute la durée du trajet. Elle ne savait que dire, elle était trop occupée à se demander pourquoi elle avait un mauvais pressentiment concernant cette soirée. Arrivée au théâtre, Estéfania descendit de la voiture en murmurant un simple « merci » à Thomas. Nathanaël était là, à l’intérieur, et l’attendait. Il pris son bras et monta avant elle dans les escaliers, comme la bienséance l’exigeait. Une fois dans la loge qu’il avait réservé, le jeune homme la laissa s’asseoir et s’assit ensuite.

La pièce en elle-même était très réussie. Il s’agissait d’une représentation de la tragédie « Roméo & Juliet » de Shakespeare. La représentation était jouée en anglais, langue de Nathanaël et Estéfania comprenaient tous les deux. Cependant, un ombre vint noircir le tableau de la soirée qui avait si bien commencé.

A la fin de la représentation, leurs lèvres s’approchèrent, mais celles de Nathanaël se reculèrent brusquement. Après l’avoir questionné maintes et maintes fois, le jeune homme finit par lui avouer le contrat de mariage qui unissait son frère à Estéfania. C’était d’ailleurs pour célébrer ce futur union que les parents des deux jeunes nobles étaient sortis. La réaction de la future madame Sergueï ne se fait pas attendre. Une colère immense surgit et s’empara d’elle. Elle sortit de la loge, sans se retourner aux « Estéfania, attend » qu’elle entendait. Jamais, jamais elle n’avait subi une pareille humiliation. Elle se sentait trahie, souillée. Elle avait ouvert son cœur à quelqu’un et ce quelqu’un l’avait trahie, il s’était moquée d’elle en lui cachant ce contrat de mariage.

Estéfania sortit du théâtre, d’un pas frustré, mais les larmes lui montaient aux yeux. Elle chercha la voiture de Thomas du regard, espérant qu’il n’était pas trop loin, et le trouva à quelques mètres de l’endroit où elle était. Elle entendit un fouet retentir, signe que Thomas l’avait vu. Elle entendit les paroles de Thomas.

- Qu'est-ce qui se passe? La pièce était mauvaise à ce point?
- Ce n’est pas ça… C’est tellement compliqué à expliquer

Suite à cela, elle se tut. Elle cherchait les mots pour expliquer ce qu’elle ressentait, ce qui s’était passé, à quel point elle se sentait humiliée, souillée, trahie. Elle réfléchissait… C’était encore une chose qu’elle adorait chez Nathanaël. Il réfléchissait…avec son cerveau et non avec son estomac ou son entre-jambre.

- Je ne t’ai pas dit la vérité en te demandant de me servir de cocher ce soir. J’avais bien évidemment rendez-vous avec un jeune homme, mais mes parents n’étaient pas au courant. Ils sont sortis ce soir pour célébrer un nouveau contrat de mariage me concernant. Il me lie en vérité à une personne qui est tout à fait détestable. J’ai appris l’existence de ce contrat ce soir, de la bouche de l’homme avec qui j’étais. Il est au courant de cela car il est le frère de la personne à laquelle je suis fiancée. Et le pire dans l’histoire, c’est que j’en suis amoureuse, de ce beau noble avec qui j’ai passé la soirée !

A ce moment, Estéfania fondit en larmes. Elle avait ouvert deux fois son cœur en une soirée. Elle l’avait ouvert aux deux hommes qui comptaient le plus pour elle. Elle pleurait aussi de honte. Elle avait menti à son frère de cœur. C’était une chose très grave pour elle car la confiance était une chose primordiale à ses yeux.

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Thomas n'avait aucune idée de ce qui pouvait bien s'être passé à l'intérieur de se théâtre, mais chose certaine, ça ne devait être rien de bon, puisqu'Estéfania pleurait à chaude larme. Il descendit de son poste de chauffeur, pour venir lui ouvrir la porte et il restait à l'extérieur de la diligence, ne sachant pas trop comment se comporter. Ce qu'il craint, c'est que s'il se comporte de façon trop familier avec elle, les gens vont les juger et il pourrait bien y avoir des rumeurs gênantes le lendemain, chose que tiens à éviter Thomas, qui ne veut pas d'attention sur lui, ni causer davantage d'ennuis à Estéfania. N'empêche, il ne peut pas faire autrement que de demander ce qui peut bien se passer, mais sans le faire directement. Mal à l'aise, dans un état qui fait peine à voir, elle lui répond qu'il ne s'agit pas de ça et que c'est compliqué, ce à quoi il acquiesce doucement, ne disant rien d'autre. Il n'aurait pas su quoi dire de toute façon, si elle ne veut pas en parler, elle a ses raisons. Il allait fermer la porte et la ramener chez elle, lorsqu'elle commença à lui expliquer. La regardant, parce que pour lui, le contact visuel est une chose nécessaire, il la laisse lui raconter, essayant de comprendre, ce qu'il ne tarde pas à faire.

Estéfania ne lui avait pas raconté en détail la nature de se rendez-vous. Il faut dire que beaucoup d'hommes la courtisaient et espérer avoir se fameux contrat de mariage avec la jeune noble. Seulement, il ignorait qu'elle était amoureuse de quelqu'un, car c'est bien de se quoi il s'agit ici. Il apprend coup sur coup qu'elle était amoureuse, mais aussi, qu'elle va se marier. Il aurait espéré que se soit avec le jeune homme pour qui elle en pince, mais malheureusement, la vie est parfois tordue au point de se jouer de nous. C'est ainsi qu'Estéfania appris qu'elle marierait le frère de se dernier, sans doute l'aîné. Autrement dit, elle va se marier avec le frère de l'homme dont elle était amoureuse. On pourrait difficilement imaginer pire scénario pour la jeune femme. Elle répète ce qu'il avait déjà compris, qu'elle est amoureuse et il acquiesce doucement. Il ne peut la ramener chez elle dans cet état, tandis qu'elle pleure et tout. Il fouille ses poches et sort un humble mouchoir, lui tendant tandis qu'il ferme la porte de la voiturette.

-Estéfania, ne pleure pas, je t'en pris. C'est un choc, c'est difficile à encaisser. Tiens, prend se mouchoir... Tu sais se qu'on va faire? Je ne crois pas que le moment soit bien choisi pour te ramener chez toi alors nous allons aller au parc, trouver un endroit tranquille et on pourra parler de tout cela. Ici, devant le théâtre, ce n'est pas vraiment un endroit approprié. Alors patience et puis... le trajet d'une dizaine de minutes te donnera le temps de réfléchir.

Il essaie de faire un petit sourire réconfortant, puis va reprendre sa place de cocher, plaçant sa petite casquette, faisant claquer le fouet, ce qui met les chevaux en marche. Comme prévu, le trajet n'est pas bien long et il se retrouve dans un sentier large du parc de la ville, un endroit mis en place récemment pour servir de lieu de tranquillité pour les riches de la ville, les pauvres n'y ayant pas vraiment accès, en dehors de quand vous y aller pour des raisons semblables à celle de Thomas, parce que vous accompagnez votre maître. Autrement, la police vous en chasse, de peur que vous ne souillez les lieux. N'empêche, il y a bien quelques légendes d'habitants sur se que peut cacher la noirceur de se lieu tranquille. Arrêter la diligence, il prit une petite inspiration. Il va maintenant pouvoir accorder tout son attention à Estéfania, qui n'est sans doute pas encore tout à fait remise. Descendant de son poste, il entre dans le lieu et vient s'asseoir à côté d'elle. On l'a vu, les deux s'adressent un à l'autre avec une aisance et une familiarité un peu particulière quand on connait le monde qui les divise, mais malgré tout, il se sent proche d'elle et il a toujours été là quand elle avait besoin de lui et se soir ne fera pas exception.

-Je, je ne sais pas vraiment quoi dire, n'ayant jamais vraiment été amoureux moi-même... et je ne suis pas vraiment doué dans le domaine de l'amour et tout. Quel réconfort qu'il y aurait à ce que je te dises que les mariages heureux sont rare de nos jours? Que croire que l'on peut choisir relève de l'illusion. Ce qui t'arrives est certainement injuste et, crois moi, cela m'attriste de te voir dans cet état. Seulement... je sais que tu es une des femmes les plus fortes de caractère que je connaisse et peu importe les épreuves, je sais que tu passeras à travers, que tu y survivras et que tu n'en sortiras que plus forte. Sans doute que se soir ne fait exception, mais accorde toi quand même un moment de peine, tu y as bien droit.

Voilà, c'est le mieux qu'il puisse faire. Espérons qu'Estéfania y trouve une forme de réconfort, malgré ses maladresses fort probable.

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